Qu’est-ce qu’un ‘Carré Magique’ ?
Un carré magique est une succession de lettres, ou de chiffres (exemple : le carré de chiffres sur la gravure d’A. Dürer « Melencolia, si » -1514), disposés le plus souvent en carré.
En ce qui concerne les lettres, de quelque façon qu’on les lise, elles donnent chaque fois les mêmes ‘mots’. L’ordre peut être de haut en bas, de gauche à droite ou inversement, exception faite des diagonales.
Pour les chiffres, lorsqu’on les ajoute en ligne, horizontalement ou verticalement (sauf en diagonale là aussi), le résultat donne chaque fois la même somme.
Pour l’instant, seul l’ensemble de lettres nous intéresse et plus particulièrement la disposition sur un carré à cinq lettres de côté, qui a pour nom ‘Carré SATOR’. La distribution de ces cinq lettres par ligne donne un mot lisible à chaque fois. Son nom vient du premier mot formé sur la première ligne : SATOR. On peut également le trouver dans l’inversion de sa première ligne : ROTAS.
En voici les assemblages :
S A T O R A R E P O T E N E T O P E R A R O T A S | R O T A S O P E R A T E N E T A R E P O S A T O R
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On voit dans les deux cas que la lecture des lignes se fait bien dans tous les sens, horizontaux et verticaux, pour les cinq mots formés : SATOR - AREPO - TENET - OPERA - ROTAS. Ce carré de cinq lignes est un palindrome parfait.
« Palindrome : Vers, phrases offrant le même sens quand on les lit de gauche à droite ou de droite à gauche (exemple : un roc cornu). Tel ce vers latin : Roma tibi subito motibus ibit amor. » Dictionnaire Encyclopédique Quillet 1970.
La découverte de deux carrés magiques
Le carré SATOR fut découvert dans les ruines de Pompéi une première fois par le professeur Matteo DELLA CORTE, en 1925, dans les vestiges de la maison d’un certain Paquius Proculus. Mais il prend toute son importance lors de la mise à jour d’un autre carré du même type, le 12 novembre 1936, par le même professeur, celui-ci cette fois gravé sur une colonne de la grande palestre, encore à Pompéi! Ce fut le début de la célébrité de cette curiosité, à ce jour toujours énigmatique, malgré un grand intérêt pour le sujet d’un nombre considérable d’érudits de toutes sortes. Ajoutons que le premier à s’être intéressé au carré SATOR et à lui avoir apporté, en 1926, la première interprétation… religieuse, est le pasteur saxon Félix Grosser. Il constate que les 25 lettres (5X5) disposées selon la forme d’une croix, dont le centre est le ‘N’ (la seule lettre non répétée dans le carré) donnent les deux mots PATER NOSTER dans les deux sens… eux-mêmes encadrés par les lettres A et O pouvant se comprendre comme Alpha et Oméga !
En voici le tracé :
A
P
A
T
E
R
A P A T E R N O S T E R O
O
S
T
E
R
O
Différentes interprétations s’élevèrent aussitôt contre cette approche religieuse, en raison du fait que Pompéi fut détruite en 79 de notre ère, et qu’il semblait léger d’admettre cette inscription comme la manifestation admise d’une religion naissante! Le tout, après cette première contre-attaque, était de donner d’autres hypothèses toutes aussi recevables sur le principe… et elles ne manqueront pas, comme nous le verrons.
Mais ou sont les carrés ?
A présent, tentons de dresser une liste des lieux où fut découvert le même tracé de principe du carré SATOR.
Espagne :St-Jacques de Compostelle.
Angleterre :Cirencester (dans une enceinte militaire).
Hongrie : Budapest, le carré est gravé sur une tuile romaine trouvée lors de fouilles (datée de 105 de notre ère).
Allemagne :Sur des monnaies.
Italie :-Pompéi, les deux premiers carrés retrouvés.
-Crémone, dans le couvent de Ste Marie-Madeleine ( ?) et dans l’église Pieve-Tersaqui.
-Sienne, sur l’extérieur de la cathédrale.
-sur deux livres anciens conservés à la BN d’Italie.
France :-Fontgillarde – Hautes-Alpes, sur une très ancienne demeure.
-Jarnac – Charente, dans le château lui-même.
-Loches – Indre et Loire, dans le donjon du château… et un autre dans une propriété ayant appartenue à Agnès Sorel.
-Oppède – Vaucluse, sur un tableau de porte.
-Le Puy-en-Velay – Haute-Loire, sur une ancienne bâtisse.
-Rochemaure – Ardèche, dans la chapelle de St Laurent au pied du château.
-Valbonnais – Isère, sur un linteau d’ouverture d’une construction ruinée.
Les plus anciens carrés furent probablement trouvés à Doura-Europos ( sur les rives de l’Euphrate) ; ils dateraient de 260 avant notre ère et seraient au nombre de quatre, répertoriés, tous basés sur la forme SATOR…
Et les autres…
Nous nous sommes inspirés, pour cette liste, des ‘carrés’ cités par les auteurs compétents en la matière. Ces listes datent de plusieurs dizaines d’années. Il y a lieu, maintenant, d’ajouter les carrés que nous connaissons et qui ne sont pas signalés :
Narbonne (Aude): une fresque dans l’horreum.
L’ermitage de Galamus (Aude) : dans la troisième grotte transformée en chapelle.
Les ruines du château d’ Opoul (Pyrénées-Orientales).
L’étrange pierre de Stenay (Meuse).
Le savoir et le silence
Certes, de nombreuses interprétations ont été avancées pour tenter d’expliquer cette énigme, déjà posée il y aurait plus de deux mille ans, et donc antérieure à la religion chrétienne. Cependant, pour certains auteurs, ce mystérieux message aurait été repris par l’Eglise et plus particulièrement sous l’aspect du ‘testament de St Paul’ (Charles Cartigny) … Ce qui reviendrait à supposer que, par exemple, St Irénée, martyrisé à Lyon, ait eu connaissance du carré, en ait trouvé la solution… et qu’il en ait compris son sens hermétique et en ait fait une sorte de reconversion simple sur le thème de la religion. Ce constat reviendrait-il à dire que nos savants, et leurs modernes ordinateurs, seraient moins capables ou perspicaces qu’un martyr, de venir à bout de cette énigme millénaire ?