Des peines de dix-huit mois de prison ferme contre deux anciens médecins de l'hôpital d'Epinal et leur collègue radiophysicien ont été prononcées mercredi au procès du plus grave accident de radiothérapie recensé en France.
"Soulagement", "apaisement", "poids enlevé": la quarantaine de victimes et leurs proches venus entendre le jugement au palais de justice de Paris n'ont pas caché leur satisfaction même si la perspective de "revivre tout ça en appel" en effrayait plusieurs.
Entre 2001 et 2006, près de 450 patients de l'établissement traités pour des cancers de la prostate ont été victimes de surdoses de radiation lors de deux dysfonctionnements distincts. Douze en sont morts, selon un dernier bilan communiqué au procès et les autres souffrent d'atteintes difficilement vivables du système urinaire et anal.
Un des médecins a déjà annoncé son intention de faire appel, les deux autres praticiens y réfléchissent "fortement", selon leurs avocats. Tous sont repartis libres et visiblement sonnés.
Me Gérard Welzer, avocat d'un grand nombre de parties civiles, a salué un résultat "qui couronne le travail des victimes", alors qu'en "matière de santé publique, les condamnations sont de plus en plus rares".
Six ans après les premières plaintes en 2006, les juges ont estimé le radiophysicien Joshua Anah, 54 ans, coupable d'homicides et blessures involontaires, soustraction de preuve et l'ont condamné à trois ans de prison dont 18 mois ferme et 10.000 euros d'amende. Il est interdit d'exercer sa profession pendant cinq ans.
Pour homicides et blessures involontaires ainsi que non assistance à personne en danger, les deux médecins radiothérapeutes Jean-François Sztermer, 64 ans et Michel Aubertel, 62 ans, sont condamnés à 4 ans de prison dont 18 mois ferme et 20.000 euros d'amende chacun. Ils sont interdits définitivement d'exercer.
"Cacher la vérité"
Le tribunal a relaxé les quatre autres prévenus poursuivis pour non assistance à personne en danger: Francette Meynard, ex-directrice de la Ddass des Vosges; Jacques Sans, ancien directeur de l'agence régionale d'hospitalisation de Lorraine ; Dominique Cappelli directrice de l'hôpital et l'établissement lui-même comme personne morale.
Joshua Anah, chargé du paramétrage des appareils, a "accumulé les erreurs graves" modifiant en 2004 le protocole de radiothérapie "dans une totale improvisation" et tentant de "faire échec à la découverte des infractions en dissimulant des preuves", dénonce le jugement consulté par l'AFP. Trois ans de prison dont un ferme avait été requis à son encontre.
Alors que le ministère public n'avait pas demandé de condamnation des deux radiothérapeutes pour homicides et blessures involontaires, le tribunal a retenu ces charges.
Le ministère public avait prononcé un réquisitoire impitoyable contre leur "volonté de cacher la vérité" aux victimes, leur tentative de minimiser les accidents.
Le procès à l'automne 2012 avait mis en lumière le fonctionnement "autarcique" du service où s'est produit le drame. Les parties civiles avaient mis en cause le "désir de briller" des praticiens, via l'expérimentation de nouvelles techniques.
Des accusations rejetées par les prévenus qui avaient imputé les difficultés au manque de moyens humains, au flou des directives de l'époque sur la radiothérapie, au système et non aux individus.
Au final, avait affirmé un médecin dépêché à l'hôpital d'Epinal après le drame, cet établissement n'aurait connu "en vingt ans" que trois mois de fonctionnement sans sur-irradiation. Un troisième incident de moindre ampleur sur des centaines de patients traités entre 1989 et 2000 est en fin d'instruction judiciaire.
Source : http://fr.news.yahoo.com